Si la plupart des agneaux sont vigoureux, surtout chez le rustique mouton d’Ouessant, il en est toujours quelques uns qui se montrent plus faibles. Ceux-là ont besoin des soins du berger. Réchauffer et biberonner sont les gestes qui sauvent. Sauver un agneau en le biberonnant est l’expérience que nous vivons avec Salto depuis la fin du mois de mars dernier.
La faiblesse est un signe à prendre très au sérieux!
Salto est né le 25 mars dernier de Praline, maman expérimentée. Comme Bambi né quelques jours auparavant de Paulette, une autre maman chevronnée, Salto était faible. Ces deux agneaux ne paraissaient pas téter.
De plus, les mères semblaient avoir la tête ailleurs. Leurs agneaux les intéressaient peu. A mon arrivée à la bergerie, Paulette avait trois béliers qui la courtisaient, ce qui arrive parfois au momentde la mise bas. Les parturientes émettent alors des phéromones qui déclenchent l’intérêt des mâles. Quant à Praline, elle broutait à plusieurs mètres de son petit, lové au sol, comme abandonné. Normalement, les nouveau-nés sont très entourés les premiers jours.
Une clef: réagir vite…
Dans le cas de Bambi, ma réaction a été de favoriser le lien mère petit et de laisser faire la nature quelques heures. Mauvaise intuition. Après une matinée passée avec sa mère enfermée dans la bergerie, les mâles ayant été mis à la porte, Bambi était encore plus faible. Amené en urgence chez le vétérinaire, il est mort quelques heures plus tard. Malgré les multiples soins déployés tels que perfusion, antibiotiques, couverture chauffante, bouillottes, etc., il n’a pas trouvé l’énergie nécessaire.
Après maintenant quelques saisons d’agnelage, c’est malheureusement mon expérience systématique: les soins vétérinaires sont inutiles, le petit part malgré tout. Sur une quarantaine de naissances annuelles, il y a toujours deux ou trois agneaux qui nécessitent des soins vétérinaires, dès la naissance ou dans le mois qui suit. En dehors d’une réelle pathologie, cas vraiment rare, il semblerait que leur faiblesse et le manque d’intérêt de leur mère soient liés. Suite à mon intervention auprès de l’agneau Salto, prendre le relais en biberonnant semble être une meilleure démarche que les investigations vétérinaires. Cela, à condition de réagir rapidement, soit avant que le petit ne soit trop s’affaibli.
Né probablement dans la nuit précédente ou tôt dans la matinée, Salto a reçu le premier lait avant midi. Ce colostrum tellement essentiel aux défenses immunitaires des nouveau-nés a été récupéré par la traite de Praline sa maman. Ces premiers gestes furent faits à l’aide d’une seringue. Les biberons suivants (acheté chez le vétérinaire, taille « chiens-chats ») furent aussi remplis du lait maternel. Nous avons gardé Praline quelques jours « sous la main », dans l’espoir de voir se créer le lien mère-petit. Il restait la possibilité que l’agneau, devenu plus vigoureux, ravive la flamme maternelle.
Si la brebis ne prend pas le relais…
Mais l’intérêt de Praline pour Salto est resté quasiment inexistant. Tout juste quelques bêlements peu expressifs quand on le lui prenait pour les biberons. Et quand il était dans l’enclos, il était peu considéré. Salto, de son côté, ne semblait pas comprendre que Praline représentait autre chose qu’une simple présence. Il ne cherchait ni la mamelle, ni sa chaleur, ni sa proximité. Nous avons du admettre que ces deux là ne formeraient pas une paire fonctionnelle.
Ce petit a ainsi porté toute son énergie sur le monde humain. Les biberons, les caresses, la maison, le jardin, la voiture, les chiens… Tout lui est devenu familier. En effet, pour des raisons d’organisation pratique, Salto a du rester à la maison afin de pouvoir recevoir 4 à 5 biberons quotidiens. N’ayant pas de bergerie à la belle saison nous permettant d’accueillir quelques moutons qui auraient pu rester avec Salto, celui-ci a fait un transfert sur la compagnie offerte à la maison, soit les humains, les chiens et les cochons d’Inde qui partagent son enclos.
Altération inévitable du comportement
Le mouton étant un animal social, et dans ces conditions de manque affectif, nous consacrons à Salto le plus de temps possible. Ce, en termes de présence, de caresses, de jeux et même de promenades, le tout en compagnie des chiens. Mais tout en lui apportant du soutien dans son développement, cela ne fait que renforcer son manque d’intérêt pour ses congénères moutons.
Malgré l’impossibilité de le laisser en permanence avec d’autres moutons, il nous accompagne le plus souvent sur les parcelles lors des contrôles, des montages et démontages de clôtures, des chargements de moutons, des changements de parcelles, etc. Bien que souvent intrigué voire excité par les autres moutons dans les premiers instants, son intérêt ne dure pas et après quelques minutes il cherche la présence de « sa brebis humaine ».
Il ne reste plus qu’à espérer que son attitude change après le sevrage. Une fois moins dépendant de la présence « maternelle », même bipède, il montrera peut-être davantage d’intérêt envers ses congénères. Pour cela, la prochaine période de chaleurs des brebis sera peut-être un facteur déclenchant.
Biberonner mais aussi soigner par l’ostéopathie
Pour mettre Salto « sur les rails », il n’a pas seulement fallu quelques biberonner. Quelques séances d’ostéopathie lui ont aussi été prodiguées. Bien que capable de se tenir sur ses quatre pattes dès le premier lait administré, sa démarche semblait un peu déséquilibrée. L’appui sur les membres postérieurs n’était pas équivalent des deux côtés.
Salto était également atteint de cryptorchidie. Ses testicules n’étaient pas dans les bourses, même plusieurs semaines après sa naissance. Ceci a également été travaillé par l’ostéopathie.
L’ostéopathe (autre casquette de la bergère) a beaucoup travaillé à libérer les tensions autour des vertèbres lombaires et intra-abdominales, principalement autour des cordons spermatiques. L’état de santé, la locomotion et la descente des testicules sont actuellement satisfaisants. Les deux testicules sont présents dans les bourses, même si le gauche est plus haut que le droit, à la limite de l’abdomen. Actuellement, Salto court prestement après les chiens et le ballon. Il nous offre aussi parfois de joyeuses cavalcades en « sauts de mouton ».
Des progrès incontestables et une belle vitalité
Depuis le 25 mars dernier, Salto a bien grandi. Il a une morphologie tout à fait normale et des proportions moyennes, bien qu’un peu gros. Un léger surpoids sans doute imputable à un manque d’exercice additionné au souci de sa bergère de le biberonner trop souvent, dès la manifestation du moindre de ses désirs. Les cornes se développent bien, là encore dans la norme par comparaison aux agneaux de son âge.
Pour les mois à venir, le principal souci de sa bergère sera de savoir l’intégrer au troupeau afin de satisfaire à son bonheur et aux besoins liés à son espèce. Nous espérons avoir un mouton extrêmement apprivoisé au sein du troupeau tout en montrant des comportements normaux avec ses congénères. En dehors d’être sympathique pour la bergère, un mouton apprivoisé calme le reste du troupeau dans des situations stressantes.
A suivre d’ci l’hiver…
Bonjour
J’ai été ravi de lire votre expérience. Nous vivons à meublées l’anhèle chose en ce moment avec Oreo… ne il y a bientôt 2 mois.
Mais je me demande combien de temps avez vous donner le biberon? Je costaud avec les autres moutons agneau que l’on a eu que le sevrage naturel est d’environ 4 mois.
A ce jour il broute de plus en plus. Mais à encore besoin de son biberon (et du câlin qui va avec).
Merci de votre retour
Arno
Bonjour,
Merci pour ce commentaire.
Nous avons biberonné Salto pendant au moins 3 mois. Selon le vétérinaire, un mois et demi serait suffisant pour que l’agneau survive, mais c’est un peu dur de le laisser comme ça, livré à lui-même si jeune!
Le sevrage n’est pas si facile, car effectivement il crée également du lien. Notre Salto est encore capable de réclamer du haut de ses 6 ans s’il voit qu’un autre agneau est biberonné! Il nous est arrivé de lui donner des biberons d’eau pour satisfaire ses exigences! 🙂
Courage avec Oréo. Bien cordialement,
Catherine.